La Paix

Aristophane / Christine Delmotte

La scène se situe dans les environs d’Athènes, par une belle matinée de printemps, en l’an 421 avant Jésus-Christ. Pour une fois, Aristophane est heureux et en plein accord avec la cité : dans la seconde partie de cette comédie, la paix reviendra, le monde réel et la fantaisie coïncideront. Lavendange, un vigneron héroïque, va nous emmener dans le surnaturel pour mener son utopie à bien. Son vol vers les dieux sur un énorme scarabée bouffe-merde est une chevauchée épique pour retrouver la déesse Paix.

Aristophane est un pacifiste.
Avec « La Paix », l’enjeu est important : il ne s’agit pas d’une farce mais d’un débat de fond qui, à cette époque, traverse la société athénienne.
La guerre du Péloponnèse, dont le résultat final marquera la fin de la puissance athénienne, fait rage depuis 431 : la peste, les combats, les privations réelles donnent un relief tout particulier à l’utopie de la vision finale d’un âge d’or campagnard retrouvé et d’un mythe d’abondance où on se prend à rêver simplement de gâteaux…
La pièce est jouée en 421, alors qu’on négociait la paix de Nicias qui démontra très vite qu’elle n’était qu’un leurre.

Lavendange, le vendangeur génial, partisan de réjouissances mémorables plutôt que de trompettes guerrières, nous renvoie à l’origine première de la comédie, à ces fêtes en l’honneur de Dionysos, fils de Zeus et meneur échevelé des Bacchantes.
Pièce de propagande pour la paix, Aristophane emploie les arguments les plus terriens possibles : faire ripaille, faire l’amour, faire la sieste. Voilà son tiercé gagnant.
Qui ne lui envierait cette vision hédoniste de la vie ?
Il veut nous donner le talent de la jouissance de tous les plaisirs terriens.
La paix, c’est l’abondance, le bonheur de vivre.

Ce rapport jouissif à la nature, aux objets de la nature quels qu’ils soient, nous voulons le célébrer dans le spectacle.
Des machines de jeux sont fabriquées à partir d’assemblages de matériaux de récupération pour le scarabée bouffeur de merde, pour la guerre, pour le totem de la paix, pour l’autel de sacrifice.
Des rangées d’oignons aux oranges et aux citrons séchés, les couleurs nous émerveillent l’œil et l’esprit.
La beauté hallucinante de la nature dans sa simple présence en désordre.
Le soleil du midi, couché dans les foins, avec une belle fille ou un beau garçon à ses côtés (ou les deux, d’ailleurs !)… voilà une image certaine de « La Paix » telle qu’Aristophane pourrait nous la proposer.
Telle en tous cas que la Compagnie Biloxi 48 conçoit ce spectacle.
Les allusions sexuelles les plus déroutantes et les plus drôles évoquent des jeux en dehors des clichés habituels, qui cultivent l’humour et le décalage, l’auto-dérision et la bizarrerie.
La scatologie, tellement importante chez Aristophane, nous projette loin de la soi-disant bienséance et du soi-disant bon goût.
De l’incongruité !

« La Paix » d’Aristophane permet beaucoup de fantasmes de mise en scène.
Le texte, minimal, exige une grande inventivité, il est comme une structure de base pour composer des délires.
Une poésie particulière doit être imposée.
Je choisis celle du melting-pot, de métissage, du bricolage à partir d’objets de récupération, du maquillage inter-ethnique, bref, du bazar réjouissant pour le corps et l’esprit.
De l’iconoclaste ! Du bric-à-brac et tout le saint-frusquin !
Il y aura mélange de styles, de disciplines particulières: des claquettes, du mime, des clowns, des délires verbaux, des danses grotesques, des blagues idiotes…
Des bouffons sont à l’œuvre, riant, hurlant, se tordant dans tous les sens.
Des chants égrènent le spectacle, rythment la farandole.

Christine Delmotte, metteuse en scène

Production

Une production de la Compagnie Biloxi 48
Avec l’aide du Ministère de la communauté française, Direction générale de la Culture – Service Théâtre et la participation du Centre des Arts Scéniques

Distribution

Texte : Aristophane
Avec : Jean-Claude Derudder, Eric De Staercke, Ansou Diedhiou, Bruce Ellison, Soufian El Boubsi, Fanny Hanciaux, Yasmine Laassal
Adaptation, mise en scène et scénographie : Christine Delmotte
Traduction : Christine Delmotte assistée de Sabrina Nicolucci
Création éclairage et scénographie : Nathalie Borlée
Costumes : Cathy Peraux
Assistanat général : Catherine Ansay et Sabrina Nicolucci
Assistanat à la mise en scène : Bouchra Ezzahir

Dates de création

Du 13 novembre au 31 décembre 2003

Théâtre de la place des Martyrs